Thierry Cloâtre, solidaire
Tombé dans la marmite du Secours Populaire à la trentaine, Thierry Cloâtre ne s’est depuis jamais arrêté d’aider. Plus qu’une valeur qu’il porte haut, la solidarité au quotidien est son étendard.
Souvent, la vie est affaire de choix. En 1996, alors jeune adulte, Thierry Cloâtre est face à l’un d’eux : « C’était soit le théâtre, soit la solidarité. J’ai choisi la solidarité. » Deux ans plus tard, il pousse la porte du Secours Populaire en tant qu’emploi jeune.
Créée en 1945, l’association fête ses 80 ans cette année, et Thierry Cloâtre ne s’en cache pas : « Pour ma part, je suis tombé dans la marmite », sourit-il.
L’armée des bonnes volontés
En 2019, après une longue parenthèse du côté de l’antenne du Secours Populaire du Doubs, le Brestois est de retour dans sa ville, qui héberge le siège finistérien du Secours Populaire. Il en devient le directeur général départemental. « Plus que le grand manitou, je suis le simple animateur d’une fédération où ne travaillent que cinq salariés. Tout le reste est assuré par 4 396 bénévoles en Finistère, dont 900 qui se démènent sur Brest. Sur le Finistère, ces bénévoles représentent environ 131 équivalents temps plein ! »
Il y a de la passion, chez Thierry Cloâtre. Une réelle forme d’admiration à destination de ceux qui aident. « La solidarité doit demeurer sans barèmes, sans barrières, sans frontières. Si quelqu’un a besoin d’aide, quelle qu’elle soit, on la lui apporte. Et c’est bien ça, le moteur de tous les bénévoles, dans une société où quasiment tout est devenu marchand. »
mini bio
1972 : naissance à Brest
1996 : entrée au Secours Populaire en tant qu’objecteur de conscience
2000 : naissance de son fils, à Brest
2002 : déménagement à Besançon
2006 : naissance de sa fille, à Besançon
La banalisation de la pauvreté
Solidarité, donc. Mantra, leitmotiv, boussole de cette vie que Thierry Cloâtre s’est choisie. « C’est une notion devenue très paradoxale. Les gens sont solidaires. Les donateurs sont toujours au rendez-vous, les actions qu’on mène attirent toujours autant de petites mains prêtes à aider… On la sent, cette volonté de bien vivre ensemble, de se soutenir les uns les autres. Pourtant, dans le même temps, petit à petit, on a assisté à une forme de banalisation de la pauvreté : voir un retraité, un étudiant, un salarié pousser les portes d’une association pour se nourrir, c’est devenu commun… »
À l’heure où 11 millions de personnes en France auraient besoin d’aide pour se nourrir, Thierry Cloâtre peine à cacher son dépit. « Au début des années 2000, on voyait un retraité franchir nos portes. En 2024, à Brest, ils étaient près de 600 !
Et on dénombre autant d’étudiants qui en sont au même point, tant la situation est devenue dramatique pour eux aussi ! »
Le sens des mots
Si les besoins alimentaires sont évidemment majoritaires, d’autres types d’aides ont dû être imaginés par le Secours Populaire à destination, justement, de ce “nouveau public” : prêts d’ordinateur, sorties organisées « pour leur permettre de s’offrir un peu “d’espace”… ».
Et qu’on ne vienne pas lui parler de “bénéficiaires” de ces aides : « Ou alors qu’on me démontre quels bénéfices il y a à franchir les portes d’une association caritative ! »
L’homme de solidarité ne se refait pas. Il sait que les mots ont un sens. Qu’ils se doivent d’être justes. Comme ceux qu’on utiliserait au théâtre, dont il reste un fervent amoureux et comédien au sein d’une troupe amateur.
Balises
« J’ai vécu ailleurs qu’à Brest, et je peux dire que Brest, c’est ma ville. Parce que je la trouve ouverte, culturelle, sociale et solidaire, absolument ! J’ignore d’ailleurs à quoi c’est dû… Est-ce son caractère “au bout du monde” qui fait qu’ici, on ne peut rien attendre de personne ? Que si on a besoin de quelque chose, il faut le créer ? En attendant, je sais que c’est loin d’être partout pareil. »